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Cinéma

Soko pour TRENDS : « Je suis dévorée par mes personnages »

Dans cette interview l’actrice & chanteuse Soko se livre à cœur ouvert pour TRENDS sur « la danseuse » et « voir du pays », deux films à l’affiche actuellement.

Dans le cadre de sa promotion, TRENDS periodical est allé à la rencontre de l’actrice et chanteuse Soko, au cœur de deux films qui sortent ce mois ci au cinéma. « La danseuse » où elle partage l’affiche avec Lily-Rose Depp, la fille de Johny Depp et de Vanessa Paradis, et « Voir du pays » primé au festival de Cannes avec la palme du meilleur scénario. Soko, dans cette interview, nous explique sa relation très particulière entre le cinéma et sa vie privée, elle nous parle aussi musique et notamment de son troisième album en préparation. Tiraillée entre ses deux passions, Soko se dévoile et laisse apparaître une sensibilité qui n’est pas sans conséquences dans sa vie de tous les jours.

TRENDS – Salut Soko ! 

Soko – Hey ! Comment allez-vous ?

On va bien et toi ? 

S  – Je vais super bien, merci !

Top ! Nous t’avons vu hier soir lors de la première de ton film ! C’était génial ! 

S – Oh vous y étiez ? Merci beaucoup !

De rien ! Comment te sentais-tu hier soir ? T’es-tu amusée ? 

S – Oui bien sur ! Totalement. Comment n’aurais-je pas pu ? Beaucoup de mes amis étaient là. L’un d’entre eux à fait le voyage jusqu’à Paris pour être ici. Stéphanie, La réalisatrice voulait qu’on reste dans la salle durant la projection. Normalement quand on fait la promotion du film, nous ne restons pas. On le présente et puis nous partons. C’est la dernière fois que nous étions tous réunis pour voir le film. C’était tellement bien de voir tout le monde. C’était un vrai moment de plaisir parce que la dernière fois que nous l’avions vu tous ensemble c’était lors du festival de Cannes et Cannes c’est là où tu découvres le film donc c’est une énorme pression durant la promotion. Ce qui est en quelque sorte le cas maintenant parce que l’on sort un film, on doit le faire de toute façon, ça fait partie du travail en quelque sorte, mais Cannes c’est différent, les facteurs s’amplifient, donc tu vois le film, mais en réalité tu ne le vois pas vraiment.

Je suis dedans d’une manière tellement viscérale que je me perds à chaque fois dans mon rôle

C’était super, on adoré le film. Le passage où tu danses nous a donné des frissons. Tu sais quand ta peau deviens toute bizarre parce que quelque chose devient tellement excitant et beau ? C’est comme ça que l’on a ressenti cette scène, c’était vraiment magnifique. Ce mois-ci deux films  nominés à Cannes vont sortir en salles, et dans lesquels tu es le rôle principal. Qu’est ce que ça te fait ? 

S – Je pense que ça en valait la peine. J’ai du mettre la musique de côté parce que je fais des films. Je dois mettre tout mon monde musical en suspens. C’était un énorme risque à prendre pour moi car c’est quelque chose que j’adore faire. C’est tellement important  que j’ai l’impression de mettre toute ma vie en stand bye. Ce qui comprend ma musique, mes écrits, mes amis, ne plus jouer de mes instruments et complètement arrêter ma propre vie  pour aller au plus profond d’autre chose.

 Il n’y a pas que ça mais c’est aussi parce que je le fais de tout cœur. Je suis dedans d’une manière tellement viscérale que je me perds à chaque fois  dans mon rôle, et à chaque fois je me dis « Oh tu sais cette fois ça sera plus facile parce que tu es plus vieille maintenant, tu as une meilleure emprise dessus »… Mais je ne sais pas, je ne connais rien à propos de ça… en ce qui concerne « jouer un rôle », et à chaque fois que je tourne dans un film, je suis dévorée par l’histoire et par mon personnage et je disparais complètement. Je deviens cette autre entité qui revit à l’intérieur de moi. Donc c’est assez compliqué pour me replonger dans la musique après ça mais j’ai commencé à travailler sur mon troisième album en Août donc je suis pleinement de retour et je suis vraiment contente ! C’est comme un moment heureux quand le film sort et que tu te rends à Cannes et tu es genre « trop cool ». Ca en valait la peine.

Ca doit être incroyable ! Ça semble être un sentiment très agréable. Dans une interview pour Dazed tu as dit que tu ne voudrais pas essayer de jouer dans des films américains parce que tu penses qu’Hollywood a ce genre de stéréotype sur ce qu’une actrice devrait ressembler et comment elle devrait se comporter. Tu dis qu’ils aiment les filles brunes. Du coup est ce que tu envisages de venir habiter en France une nouvelle fois pour te focaliser sur ta carrière dans le cinéma ? 

S – J’ai dit que je ne m’adapterais pas à ces stéréotypes et que je ne voulais pas y prendre part.

OK. Donc est ce que tu pourrais ré-habiter en France ? 

S – Non, ma vie et ma carrière, qui comprend aussi la musique, me suivront partout où que j’aille mais j’ai vécu à Los Angeles pendant plus de 9 ans et c’est ici que je suis heureuse, où je me sens le plus créatif et le plus inspirée et j’ai cet incroyable cercle d’amis avec qui je peux collaborer. C’est ma vie, mon système de support et ma routine. Toute ma vie est à Los Angeles.

Ça a du sens. Sur Instagram dans ta bio tu marques « HyperEmotionalBeing », tu dis aussi que tu es une personne sensible et que tu aimes l’art. Comment as-tu choisi les films dans lesquels tu joues ? 

S – Alors tout d’abord j’ai rencontré la productrice, j’avais cette incroyable artiste en face de moi. Elle avait un rêve et elle souhait s’exprimer. Elle m’a dit qu’elle voulait faire un film, c’est comme ça que nous avons su que nous allions travailler ensemble et qu’elle allait m’écrire un scénario. Elle l’a fait et j’ai directement signé. Je me suis dit « Super, je suis partante, peu importe ce que c’est, faisons le« . Il s’est avéré que j’ai été vraiment chanceuse parce que son idée était géniale. C’est moi qui fait tout le travail corporel de Fuller (le personnage qu’elle incarne, ndlr) Ce tournage, ce film est un monde incroyable rempli de folie, de magie, de douleur et de beauté. C’était formidable, ça a été un travail acharné et dévoué parce que le film parle tellement de souffrance. Durant une heure et demi il te montre ce que ça fait d’être une artiste. Faire ça nous a pris 7 heures par jour, 7 heures d’expérimentation et de travail.

J’aime jouer des rôles qui sont complètement différents de ma personnalité

Donc pour « Voir du pays » l’histoire parle d’un soldat qui souffre de stress post traumatique et qui, à son retour d’Afghanistan revient complètement changée. Qu’est ce que ça ta fait de jouer dans un rôle totalement opposé à ce que tu es : calme et pacifiste ? 

S – Et bien j’adore me plonger dans mes rôles, c’est comme un défi et tout me fait sortir de ma vie pour rentrer dans quelque chose que je viens de découvrir. C’est incroyable et en plus de ça j’adore apprendre, je me sens comme une enfant lorsque l’on m’offre un livre d’histoire et que je dois apprendre tout ce qu’il à savoir à ce sujet. C’est inouï parce que ça me donne cette sensation de tout faire pour la première fois, c’est un tel sentiment rare en tant qu’adulte, que tu as besoin de revivre ça. Du genre  » Mon dieu, je ne connais rien à ça, je veux tout connaitre à ce sujet ». J’aime jouer des rôles qui sont complètement différents de ma personnalité. Je ne peux pas m’imaginer faire un film qui me ressemble, sinon il serait ennuyeux. Le public se ferait une fausse idée de ce que je suis. J’ai vraiment de la chance car je fais le travail dont je rêve. Je suis beaucoup plus pacifiste dans la vie parce que le monde actuellement est rempli de violence. Vous savez quoi ? si on se souciait un peu plus des gens et de notre planète, tout le monde pourrait se détendre et arrêterait d’imposer leurs règles et commencerait à voir le monde pour la beauté qu’il a à nous offrir. Vous voyez, changer l’angle de la caméra et regarder ça d’une manière différente. Observer toute la beauté en se distrayant. Nous sommes tous trop occupés à nous focaliser sur les aspects négatifs de notre vie plutôt que de regarder les choses positives. Je médite beaucoup. Et j’essaie d’être quelqu’un de respectueux. J’essaie de donner le meilleur de moi même chaque jours pour être une personne meilleure sur cette planète.

Deux mois après le tournage j’étais tellement mal, je ne tenais plus à la vie, je me sentais très suicidaire. J’ai annulé ma tournée, je voulais littéralement disparaître.

C’est incroyable, comme on l’a évoqué avant tu es très émotive et ça se ressent dans ce que tu viens de dire. Dans les deux films que tu as tourné, les sujets sont vraiment émouvants, est-ce que ça t’a fatigué mentalement ? C’était comme un défi à relever pour toi ?

S – Oui absolument. Je ne peux pas faire quelque chose sans me donner à 100%. Donc quand j’ai tourné « Voir du pays » c’était un personnage extrêmement violent qui s’engage avec sa meilleure amie d’enfance. Elles ont grandi ensemble, elles viennent du même milieu, de deux familles aux revenus modestes. Elles voient l’opportunité dans cette vocation de devenir soldat et de faire de l’argent tout en étant jeune et en ayant un emploi stable ainsi qu’une carrière. Elles y vont avec tellement d’espoir. Le film commence lorsqu’elles reviennent d’Afghanistan. Elles ont vécu la même expérience dramatique. Elles reviennent totalement blessées. Bizarrement mon personnage est en dénie tout le long du film parce qu’elle pense être totalement normale et j’étais moi même dans l’abnégation quand j’ai lu le script. Je savais que nous allions tourner un film sur le Stress Post traumatique, je connaissais toutes les scènes du film, je savais que mon personnage était celui qui souffrait le plus mais je n’ai pas réalisé à quel point. Quand j’étais en Grèce pour le tournage et que j’étais coincé dans cet hôtel durant tellement de semaines j’ai pris conscience à quel point c’était horrible et tellement difficile, j’ai vraiment souffert. Ce qui m’a sauvé en quelque sorte c’est qu’aussitôt revenue de Grèce, j’ai jeté mon uniforme et j’ai aussitôt mis ma belle robe de soie blanche pour m’entraîner pour « La Danseuse ». Et je ne pensais pas que j’allais revenir de l’autre film aussi forte. Cette histoire que nous avons oublié et qui a été supprimée, c’est ce qui m’a sauvé.

En 2013 tu as dit dans certaines interviews que le film « Augustine » t’avait vraiment affecté, peux-tu expliquer comment ? Est-ce que ça été la même pour « Voir du pays » ? 

S – C’était complètement différent, je jouais la première patiente hystérique diagnostiquée en 1880. Donc mon personnage était vraiment très silencieux, elle exprimait toute sa colère à travers son corps donc j’ai du m’en servir. Et puis j’ai du retourner à ma vie de tous les jours et ça a été extrêmement difficile. C’est dur de rester normal après ça parce que je suis une personne très communicative, je ressens des émotions que je sais comment exprimer. J’ai une emprise sur eux et j’adore me perdre dedans… du moins je le fais de façon délibérée. Mais avec Augustine c’était tellement compliqué, je n’avais aucune idée de ce que j’étais devenu parce que c’était tellement étranger à mes yeux,  je ne pouvais pas m’enlever de mon personnage. Deux mois après le tournage j’étais tellement mal, je ne tenais plus à la vie, je me sentais très suicidaire. J’ai annulé ma tournée, je voulais littéralement disparaître. Mon frère m’a appelé et il m’a dit « Ok, écoute, c’est devenu trop dangereux, tu ne veux pas mourir, tu aimes ta vie et crois moi que tu vas aller voir un thérapeute et prendre quelques médicaments. » Et je l’ai fait. Ça m’a sauvé parce que je n’aurais pas été capable de m’en sortir toute seule.

 Donc quelle devise tu utilises chaque jour pour aller de l’avant ? 

S –   » Be the change you want to see and you snooze you lose. Be the change you want to see and you snooze you lose » (ndlr : « Sois le changement que tu veux être et tu t’empêchera de perdre »)

Un fan t’as dit un jour que les lyrics de « Destruction of The Disguting Ugly Hate » lui a sauvé la vie, qu’est ce que tu ressens ? 

S – Et bien la musique parle d’auto-destruction donc les gens s’identifient à cette dernière, ceux qui étaient en dépression par exemple, la chanson s’adresse à eux. C’est vraiment touchant et agréable. J’ai écrit beaucoup de musiques qui me font ressentir ça dans ma vie et c’est un peu dément quand les gens me disent que mes chansons leur procurent la même sensation. Je pense que c’est parce que je suis une grande fana de musique,  je le ressens comme mon salut, donc je la comprend.

La vraie histoire d’amour se cache dans la danse et l’art et ça la réalisatrice a réussi à projeter la vision de ce qu’elle voulait représenter : une passion complète et honnête envers l’art

On a regardé ton interview de « What’s in your bag » il y a trois ans. Quand on l’a vu on s’est dit  » Oh mon dieu, ses goûts musicaux sont incroyables ». Tu es tellement passionnée quand tu parles des artistes et dont la façon dont ils écrivent. Justement quels sont ceux qui t’inspirent pour créer ta musique ? En as-tu un en particulier ? 

S – Merci ! Non j’aime beaucoup trop de choses donc c’est impossible de résumer ça à un seul artiste parce que je passe pour une idiote qui ne connait rien à propos de la musique et qui place toute son inspiration au travers d’une seule personne. Ce qui n’est pas vrai bien sur ! Donc je ne vais pas vous le dire ! Mes influences se trouvent un peu partout et il y en a beaucoup qui se trouvent dans la vidéo de « What’s in my bag ». Mais oui, en ce moment j’écoute plein de nouvelles musiques, un tas que mes amis ont enregistré. J’ai écouté le nouvel album de « La Femme » qui est un groupe français et que j’adore. J’ai aussi écouté les nouveaux morceaux de Radiohead !

Alors ? Tes impressions ?

S – C’est dément ! Je les ai vu en live il y a un ou deux mois déjà, c’était dingue.

Thom Yorke est un dieu ! 

S – Oui ! Il l’est ! Et j’ai aussi regardé le documentaire sur Scott Walker et depuis je me suis plongé à l’intérieur de son immense travail, c’est époustouflant !

Il est très fort aussi ! Donc tu vas commencer à travailler sur ton troisième album. Vas-tu faire un break ? 

S –  Je l’ai déjà fait ! J’ai passé la majeure partie de mon mois d’août à travailler dessus à New York, donc j’ai bien avancé !

On est content d’entendre ça ! 

S – Merci (rires), je suis toujours en train d’écrire.

Hier soir à la première du film il y avait une femme qui disait que « La Danseuse » était un film homophobe et que la vie de Loïe Fuller ainsi que de la relation qu’elle entretenait avec Gabrielle dans le film n’était pas claire. Qu’il y avait une part de mensonge dans le film. Tu crois que ses accusations sont justes ? 

S – Dans le film tu vois un personnage qui n’a pas de place pour son intimité mais qui est épanouie dans sa vie personnelle. La vraie histoire d’amour se cache dans la danse et l’art et ça la réalisatrice a réussi à projeter la vision de ce qu’elle voulait représenter : une passion complète et honnête envers l’art. Je pense qu’elle a fait un très bon travail ! Et puis Fuller est restée 30 ans avec Gabrielle, c’était l’amour de sa vie. Elle était ouvertement homosexuelle et sa vie fut magnifique. Il y a tellement de choses qui n’ont pas été dites dans le film comme le fait qu’elle ait été la muse de tellement de personnes : Thomas Eddison, Mallarmé… elle a fait des expériences avec Pierre et Marie Curie. C’était une chimiste. Elle n’a jamais été filmée de sa vie parce qu’elle ne voulait pas être enfermée et coincée dans une boite. Croyez-moi, elle a été une figure importante dans ce monde, mais ça ce n’est pas mentionné non plus. Donc tout ce que je dis c’est que ce film ne traite pas de son homosexualité, il ne parle pas non plus du fait qu’elle ait été la muse de pleins de gens, et nous n’en parlons pas non plus parce qu’il y a quelques scènes « fille contre fille » avec  Isadora Duncan (jouée par Lilly-Rose Depp).

Nous savons que tu détestes les questions insignifiantes mais on adore ton style, du coup nous nous devons de te demander, et on pense que tout le monde aimerait savoir, a part Gucci, quel est ton designer favoris ? 

S – Je ne porte pas vraiment de marques de créateurs sur moi. Je porte essentiellement du Vintage. Littéralement les personnes qui me gâtent le plus avec des fringues superbes c’est Gucci et je suis vraiment chanceuse !

Interview réalisée par Sarah Taibi et Alejandra Perez.

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